FondsGoetheanum: avenir de l'agricolture

Les systèmes de culture biologiques favorisent la diversité en surface (adventices) ainsi que la multiplicité de la pédofaune et des micro-organismes du sol.

 

 

« Des espèces utiles contribuent à la décimation naturelle de nuisibles comme les pucerons. Un plus pour le bio. »

La biodiversité est plus élevée

Les micro-organismes – ici vésicules de champignons mycorhiziens – sont déterminants pour le fonctionnement du sol. Ils recyclent les éléments nutritifs, préviennent l’érosion, jouent un rôle tampon en cas de sécheresse. Photo : Paul Mäder (FiBL Schweiz)

Dr Hans-Martin Krause, Dr Paul Mäder, Dr Andreas Fliessbach, tous membres du FiBL

Avec l’adaptation au changement climatique, la régulation des cycles des nutriments et la sécurité alimentaire, la perte de la biodiversité est l’un des problèmes les plus brûlants du secteur agricole. L’agriculture est le principal agent de la baisse de la biodiversité, les facteurs principaux étant l’extension des surfaces utiles, la perte corollaire d’espaces biologiques naturels et l’intensification de la production agricole par l’usage de produits phytosanitaires et d’engrais.

Pour mesurer la biodiversité, nous nous sommes concentrés dans l’essai DOC sur les espèces dont le rayon de mobilité ne dépasse pas significativement la taille des parcelles. Par suite, la valeur informative est limitée aux micro-organismes et aux animaux du sol ou aux insectes qui passent une partie de leur vie dans ou sur le sol.

En raison du renoncement aux pesticides, la diversité végétale et les réserves de graines des adventices sont nettement plus élevées dans les systèmes biologiques que dans les conventionnels. Ce qui implique d’ailleurs dans les premiers une pression plus élevée des mauvaises herbes. Mais la flore adventice elle aussi a de précieuses fonctions, les plantes à fleurs surtout contribuent positivement à la biodiversité de la faune dans les systèmes biologiques.

Araignées et insectes comme les carabidés et les staphylinidés se rencontrent deux fois plus fréquemment dans les systèmes biologiques que dans les conventionnels. En plus du renoncement aux insecticides, une population végétale plus aérée avec plus de lumière et les adventices résiduelles sont des facteurs positifs pour ces espèces prédatrices et utiles, qui contribuent à la décimation naturelle de nuisibles comme par exemple les pucerons sur le blé.

Patrick Baumann, FiBL Suisse

Habitat* totalement nouveau dans le sol

Mais dans le sol s’ouvre également un habitat totalement nouveau, où l’on trouve les espèces les plus variées en extraordinaire diversité. Une précédente étude du DOC montre déjà que la quantité et la diversité des espèces de vers de terre est nettement plus élevée dans les systèmes biologiques.

Ceux-ci aèrent le sol, facilitent par leurs galeries l’infiltration des eaux pluviales, préviennent ainsi l’érosion et mélangent dans le sol les résidus de récolte et le fumier par leur activité alimentaire. Il reste leurs turricules qui résistent aux précipitations et sont très riches en substances nutritives. Mais les vers de terre déciment aussi les spores de champignons nuisibles, contribuant ainsi à l’assainissement du sol. Dans le jargon des spécialistes, les vers de terre, en raison de leurs multiples fonctions, sont aussi appelés Ecological Engineers.

Importance des champignons mycorhiziens

La dynamique de la structure communautaire des micro-organismes du sol est très étroitement liée à celle des plantes et de la pédofaune; on a pu montrer dans l’essai DOC, pour chaque système, un microbiote différent. L’action conjuguée de ce nombre immense d’organismes protège leurs multiples fonctions dans le sol, comme le recyclage d’éléments nutritifs et le pouvoir tampon face à la sécheresse et à l’humidité.

Par microbiote, on entend le patrimoine génétique (ADN) de toutes les bactéries et tous les champignons présents dans le sol. Les bactéries sont impactées plus fortement par l’intensité de la fertilisation, les champignons par les différences entre les systèmes de culture. Parmi les champignons, il y a des espèces qui entrent en symbiose avec des plantes cultivées et ont ainsi un effet positif sur l’absorption des nutriments et la santé des plantes. On a trouvé plus de champignons dits mycorhiziens et en plus grande variété dans les systèmes biologiques. Cela peut être imputé à l’emploi réduit de fongicides et d’engrais. Les plantes utiles tirent bénéfice des champignons mycorhiziens, car ceux-ci leur apportent par leurs vastes réseaux d’hyphes (filaments fongiques) des éléments nutritifs difficilement disponibles, comme par exemple le phosphore du sol.

De récentes études dans l’essai DOC montrent que le réseau des micro-organismes est meilleur dans les systèmes biologiques. Alors qu’en gestion conventionnelle, ils sont spécialisés dans la formation de protéines, dans les systèmes avec fumier et lisier, ils ont un plus grand potentiel pour dégrader des liaisons carbonées complexes. En conclusion, les travaux dans l’essai DOC montrent que les fonctions du sol dans les systèmes biologiques sont soutenues par une biodiversité du sol élevée, qui peut ainsi atténuer les effets environnementaux négatifs des pratiques agricoles.

 

* Un habitat désigne en biologie un espace de vie déterminé par des facteurs spécifiques abiotiques et biotiques et qui se rapporte à une espèce ou un groupe d’espèces déterminées animales ou végétales.